La programmation pluriannuelle de l’énergie détermine les modalités d’action des pouvoirs publics pour la gestion de l’ensemble des formes d’énergie. Un projet de décret dit PPE3 a été soumis à consultation publique au printemps. Bruno Ladsous décrypte (en quelques épisodes les enjeux de ce document).
ACTE III – avril à juin 2025
Rappel des épisodes précédents :
- 2022-2023 : deux années perdues en consultations
- 2024 : émoi au ministère – lancement précipité d’une PPE 3
- Janvier 2025 : annonce d’un décret PPE3 précédé d’une consultation du public
- Mars 2025 : des experts (Académie des Sciences) et des parlementaires compétents appellent le Premier Ministre à surseoir au décret et à engager une phase législative
Mai-juin 2025 : un parcours parlementaire chaotique
Le projet voté par le Sénat (dit proposition Gremillet) est saccagé lors du passage en Commission des affaires économiques, puis lors du passage en séance publique :
- Les discours du Premier Ministre François Bayrou le 28 avril à l’Assemblée nationale puis le 6 mai au Sénat sont marqués par un contraste :
* D’un côté un cap clair fixé par le PM sur la base de 4 critères : une énergie abondante, une énergie bas-carbone, une énergie compétitive, une énergie souveraine. Pour TNE Occitanie Environnement il y manque malheureusement le critère essentiel suivant : une énergie respectueuse de l’environnement
* De l’autre, de gros mensonges sur les coûts complets de production des différentes sources d’énergie et surtout un ministre hargneux, qui visiblement bave d’envie sur l’éolien et le solaire industriels. - Des amendements manquant de sérieux sont votés, tels que la réouverture de Fessenheim
- Un amendement sérieux déposé par Jérôme Nury, visant à instaurer un moratoire de cinq ans sur le développement de nouvelles installations éoliennes (terrestres et maritimes) et photovoltaïques, (sauf pour les projets déjà autorisés à la date de promulgation de la loi) est voté en séance publique, mais il est retoqué lors du vote solennel le 23 juin
En fait, c’est toute la proposition de Loi qui a été rejeté le 23 juin, face à la levée de boucliers de la filière des EnR (qui ose un chantage à l’emploi en invoquant 160 000 emplois menacés, des emplois qui sont pour l’essentiel temporaires et qui appartiennent en réalité à d’autres secteurs), rejointe par la coalition des intérêts partisans y compris ceux de la Présidence de Région Occitanie.
Le sens du moratoire voté le 19 juin était en réalité le suivant :
- Prendre 10 à 12 mois pour faire étudier par une autorité indépendante et compétente (exemple France Stratégie et Académie des Sciences) des scénarios crédibles à soumettre à la représentation nationale ;
- En attendant, ne plus instruire ni accorder de nouveaux projets éoliens et solaire, dans un contexte où l’on sait que, en plus des 50 GW déjà installés il y en a 35 à 40 GW dans-les-tuyaux (déjà autorisés notamment)
Autrement dit un total de 90 GW non pilotables en plus des 90 GW pilotables existants. Donc une électricité en excès, sans possibilité réelle d’export à un prix convenable.
Quelle suite à présent ?
Le projet est reparti au Sénat en son état initial (proposition dite Gremillet). Il s’ensuivra probablement une commission mixte paritaire entre l’Assemblée nationale et le Sénat.
La DGEC (direction générale de l’énergie et du climat) est ravie de cette situation inédite et le ministre qu’elle cornaque ne cache pas sa satisfaction : cet évènement est en effet, selon eux, de nature à démontrer que le Parlement n’est pas en mesure de voter une Loi, ce qui leur permettrait alors de passer en force pour publier leur projet de décret PPE 3, au nom de l’urgence.
Mais cette urgence n’existe pas, dans un contexte où l’on constate en réalité une diminution progressive de la consommation électrique en France.