Voici donc la suite de la publication en ligne de l’ouvrage consacré aux énergies renouvelables. Ce livre est rédigé par la commission énergie du collectif Toutes Nos Énergies – Occitanie Environnement, il est coordonné par Marcel Caron.
Plusieurs d’entre vous ont déjà fait des remarques et des commentaires. Merci de votre intérêt et de vos suggestions. Les auteurs en tiendront compte et les intègreront dans la version finale. (Ici en PDF)
Il y aurait bien une solution à l’intermittence de l’éolien et du solaire, à savoir la possibilité de stocker l’électricité à grande échelle. Mais apparemment, ça ne sera pas possible avant bien longtemps. Voyons ce qu’il en est.
Chapitre 2 Les énergies intermittentes
3ème partie : Le stockage de l’énergie
L’idée est répandue que, si l’on parvenait à stocker convenablement l’électricité, alors il suffirait de stocker la production des énergies alternatives lorsqu’elle est excédentaire pour la réutiliser lorsqu’elle redeviendrait utile et améliorer ce faisant sa valorisation et donc la compétitivité de la filière considérée. Malheureusement cette façon de voir relève assez largement du sophisme.
« Le stockage a nécessairement un coût : coût d’investissement, coût d’exploitation et renchérissement du kWh restitué lié à une efficacité toujours inférieure à 1 et oscillant selon les technologies entre 25 et 95 %. Ce coût s’ajoute au prix de l’électricité stockée et vient donc le renchérir.
La panoplie des solutions de stockage comprend les stations de pompage/turbinage (STEP), les stockages thermodynamiques (CAES (Compressed Air Energy Storage)) à air comprimé et systèmes dérivés), les batteries, les super-condensateurs, les piles à combustible rechargeables, les bobines supraconductrices (SMES), les volants d’inertie, etc. sans oublier les modes de stockage indirects et hybrides : chauffe-eau à accumulation et autres stockages thermiques, hydrogène, lingots d’aluminium ou autres produits finis ou semi-finis. » (Jean-Pierre Hauet, article extrait de la Revue de l’électricité et de l’électronique)…
Il faut savoir, d’emblée, qu’il n’y a qu’une seule solution de stockage de l’électricité utilisée intéressante à l’échelle industrielle : ce sont les STEP (Stations de Transfert d’Energie par Pompage ) qui représentent la plus grande partie du stockage (99 % de la capacité de stockage de l’énergie électrique dans le monde). Elles complètent des barrages-réservoirs (ou barrages-lacs). Elles sont composées de deux réservoirs séparés verticalement. L’eau du réservoir aval est pompée jusqu’au réservoir amont durant les périodes creuses, donc souvent de nuit) afin de stocker sous forme gravitaire l’électricité prélevée.
Cette solution bien entendu n’est possible que près des barrages de montagnes. En France, la possibilité d’en installer de nouvelles est très réduite.
De nombreux autres moyens de stockage de l’électricité à l’échelle collective existent, à l’état de projets, et au mieux, au stade expérimental. Leur mise en oeuvre pose de nombreux problèmes techniques et/ou environnementaux.
Ils sont donc inutilisables aujourd’hui à l’échelle collective pour parer à l’intermittence de l’éolien et du solaire.
Citons-les :
Le stockage de l’électricité
- Le stockage par air comprimé : Les installations s’appellent des CAES (Compressed Air Energy Storage). Il en existe trois sortes selon qu’on stocke l’air comprimé en sous-sol ou en surface et selon les techniques utilisées (avec chaleur ou isotherme). Il existe très peu d’installations dans le monde, le stockage dans des cavités souterraines ou dans des anciennes mines n’étant pas simple, et pour celles qui sont envisagées en surface, elles prennent beaucoup de place.
- Le stockage inertiel : c’est un système de stockage d’électricité sous forme d’énergie cinétique. L’énergie est stockée par le biais d’un disque ou d’un rotor, tournant sur son axe dans un environnement visant à minimiser les frottements : enceinte sous vide et utilisation de paliers généralement magnétiques pour la liaison rotor/stator. Le couplage de la masse tournante à un générateur/alternateur permet de stocker et produire l’électricité. Mais l’énergie disponible n’est pas très élevée. En revanche, le coût d’investissement l’est.Le transfert d’énergie par lest : Un lest est relié à une plateforme flottante, à l’aide d’un câble. Pour stocker de l’énergie, le lest est remonté à la surface (de la mer), entrainé par un moteur électrique ; pour déstocker l’énergie, le lest descend en entrainant une génératrice. Pas simple non plus en raison de la profondeur nécessaire et du coût de la transmission de l’énergie.Une variante terrestre : une grue à six branches lève des blocs de béton de 35 tonnes et les empile comme dans un Lego géant pour former une tour. Pour restituer l’énergie et produire de l’électricité, la grue redescend les blocs de béton un par un pour reformer une seconde tour à l’extérieur de la première. L’inconvénient est que la grue et la tour de béton d’une hauteur de 120 mètres ne passeront pas inaperçues dans le paysage.
- Le stockage par pompage thermique : Le stockage de l’électricité est réalisé grâce à deux enceintes de matériaux réfractaires, respectivement à haute (entre 500 °C et 800 °C selon les technologies) et à basse température (entre -160 °C et -80 °C selon les technologies), qui servent de source chaude et de source froide à un cycle thermodynamique. Le stockage d’énergie est réalisé sous forme de chaleur sensible, en exploitant des variations de température dans le matériau. Faible maturité. Aucun retour d’expérience.-
- Le stockage électrostatique : Conçus sur le principe de base des condensateurs, les supercondensateursstockent l’énergie sous forme de champ électrique créé entre deux électrodes, avec comme différence de pouvoir atteindre des densités d’énergie et de puissance bien plus importantes, proches de celles des batteries, tout en bénéficiant d’un temps de recharge très court. Mais le temps de décharge étant court (24-48 h), l’énergie disponible est faible et ce type d’équipement est cher.
Font aussi partie de ces exemples de stockage peu productifs (à l’échelle collective)
Le stockage électrochimique (les batteries) :
Il en existe de multiples : plomb-acide, nickel-zinc, zinc-air, sodium-soufre, zebra, lithium-ion et des batteries « à circulation » : zinc-bromine et vanadium-vanadium…
Nous ne pouvons faire un exposé complet sur chacune d’entre elles. Les batteries lithium-ion sont les plus efficaces, remportent les suffrages les plus nombreux, à telle enseigne que le coût du lithium est en augmentation constante au fil des ans, ce qui fait qu’on comprend mal les prédictions de baisse de coût des batteries de l’ordre de 50 % d’ici à 2030 par certains bureaux d’études et institutions, dont l’ADEME. Y aura-t-il assez de lithium dans le monde pour satisfaire les besoins ? Il est permis d’en douter puisque le prix qui était de 2920 $ la tonne en 2002 et de 6995 $ en 2015, est passé à 16 550 $ en 2018 : selon la
US Geological, avec une production globale de 37 tonnes par an, le monde aurait assez de réserves pour 365 ans (mais à condition que la demande reste la même). Or les experts prédisent que vers 2040, le monde aurait besoin de 800 tonnes par an, rien que pour la production de batteries (c’est-à-dire sans compter les smartphones, tablettes et nombreux autres objets « connectés ») !
En fait, des réserves existent, mais sont disséminées dans la nature. Le problème est surtout qu’il n’y a pas suffisamment de mines ouvertes.
Actuellement, du fait de l’insistance des gouvernements à mettre en oeuvre la mobilité électrique, il y a un décalage entre la demande et l’offre.
Notons qu’à Soulz-les-Forêts, lieu d’expérimentation de la géothermie profonde par excellence, où des forages existent à des profondeurs d’environ 1600 m pour produire de l’électricité, du lithium a été découvert en grande quantité, ce qui n’était pas prévu. Une capacité d’1/10 ème de la demande française.
Nous savons qu’actuellement les constructeurs automobiles envisagent de privilégier les voitures électriques à batterie (25 millions en 2025 selon les prévisions) au détriment des véhicules à hydrogène (piles à combustible).
On sait qu’il sera très difficile d’obtenir une autonomie des voitures supérieure à 400 km, sauf si les chercheurs réussissaient à mettre au point les batteries lithium tout-solide (auquel cas cette autonomie pourrait être portée à 800 km), mais selon eux, rien n’est sûr et on ne le saura pas avant 2030 dans le meilleur des cas. On reste donc dans une grande incertitude quant à l’efficacité des batteries dont l’utilisation pour le stockage à grande échelle est de ce fait quasi inexistante.
Pour être plus précis, des progrès considérables ont été obtenus en laboratoire, pour des solutions diverses comme les batteries nickel-cadmium, d’autres au nickel-métal hydrure, au fluorure (10 fois plus denses et plus autonomes), au lithium-air (plus légères et aux performances supérieures), ou encore au sodium-ion qui aurait l’avantage de poser moins de problème pour l’approvisionnement en matière première, de même, comme déjà indiqué, que la batterie lithium-ion solide, mais on est encoreloin de la fabrication industrielle et de la mise sur le marché, ce qui laisse de beaux jours à l’actuelle batterie lithium-ion (liquide).
La batterie lithium-soufre s’annoncerait également. Par rapport à celle au lithium-ion, elle pourrait stocker 5 fois plus d’électricité à poids égal, mais là encore, la mise au point demandera du temps Puisque nous venons de l’évoquer, le poids des batteries joue un rôle. La voiture Tesla, réputée avoir une autonomie de 800 km, a des batteries qui pèsent deux fois plus que celles de la Zoé.
La révolution technologique en matière de batterie tarde à venir.
L’Hydrogène est l’élément le plus simple et le plus abondant dans l’univers : 93% de la matière.
Bien qu’il existe à l’état naturel dans l’écorce terrestre, l’hydrogène est aujourd’hui produit industriellement et en grande quantité : chaque année, l’industrie mondiale en consomme plus de 75 millions de tonnes dont près de la moitié (45%) sont utilisées pour le raffinage et la désulfuration du pétrole. L’autre moitié sert principalement à produire de l’ammoniac, lequel est utilisé comme matière de base dans le secteur de la chimie, notamment pour la production d’engrais.
Mais l’hydrogène est aussi employé dans l’industrie alimentaire, l’électronique, la métallurgie et l’industrie spatiale où il entre dans la composition du « carburant » des fusées.Contrairement aux énergies fossiles (pétrole, gaz et charbon), l’hydrogène n’est pas une énergie primaire, mais un « vecteur énergétique » qui, comme l’électricité, est produit à partir d’une autre source d’énergie.Toutefois il a l’avantage de posséder des propriétés énergétiques remarquables ce qui explique son intérêt. C’est le vecteur énergétique qui dispose de la plus grande densité massique : par kilo, il contient 2,2 fois plus d’énergie que le gaz naturel, 2,75 fois plus que l’essence et 3 fois plus que le pétrole.
Cependant, c’est le gaz le plus léger, ce qui complique son stockage. Pour l’entreposer, le transporter et le distribuer, il faut soit le liquéfier à une température extrêmement basse (- 253 °C), soit le comprimer à très haute pression (700 bars) et ces opérations sont très énergivores : sa liquéfaction, par exemple, consomme 10 à 13 kWh d’électricité par kg.
Pour l’essentiel, il y a deux sortes d’hydrogènes : l’hydrogène gris fabriqué par vaporeformage et l’hydrogène vert fabriqué par électrolyse (mais on verra plus loin qu’on utilise d’autres techniques et d’autres couleurs.
L’hydrogène gris
Aujourd’hui, plus de 95 % de l’hydrogène consommé dans le monde est extrait des combustibles fossiles, principalement du gaz naturel, sous l’action de la vapeur d’eau surchauffée. Des catalyseurs métalliques sont utilisés (nickel, fer, chrome, cuivre) pour faciliter les réactions. Cette technique appelée vaporeformage nécessite de porter le mélange gaz – vapeur à très haute température : entre 700°C et 1.000°C.
Elle est donc énergivore et s’accompagne d’une importante émission de dioxyde de carbone (CO2) : pour chaque tonne d’hydrogène, 10 à 11 tonnes de CO2 sont produites et en général émises dans l’atmosphère. Dès lors, la production mondiale d’hydrogène est responsable de l’émission d’environ un milliard de tonnes de CO2 chaque année.
L’hydrogène peut aussi être fabriqué par gazéification du charbon, mais cette méthode, également très grande émettrice de CO2, reste, heureusement, relativement minoritaire dans le monde. Le vaporeformage est le procédé actuellement le plus économique pour produire l’hydrogène. Son coût évalué à 1,5 €/kg est cependant 3 fois plus élevé que celui du gaz naturel.
L’hydrogène vert
L’hydrogène est présenté à grand renfort d’annonces comme solution d’avenir dans les médias, s’il s’agit d’hydrogène « décarboné » ou encore d’hydrogène « vert » :
L’hydrogène vert est produit par électrolyse de l’eau. Il s’agit du procédé qui consiste à décomposer l’eau (H20), élément naturel par excellence, en dioxygène (O2) et dihydrogène (H2) grâce à un courant électrique. L’installation qui permet cette opération s’appelle un électrolyseur.
Si l’électricité utilisée est exclusivement d’origine renouvelable (produite par exemple par des installations solaires, éoliennes ou hydroélectriques), cet hydrogène sera considéré comme « propre » et qualifié de « vert ».
L’hydrogène vert peut être obtenu par pyrolyse
Il peut être obtenu à partir du gaz naturel (qui n’est pas renouvelable) avec une technique utilisée depuis longtemps pour produire du noir de carbone industriel : il s’agit de la pyrolyse (craquage thermique en l’absence d’oxygène) du méthane à très haute température, qui dissocie le méthane (CH4) en carbone et en hydrogène, sans produire de CO2.
Cette technique est actuellement étudiée entre autres par la compagnie BASF en Allemagne. Le carbone formé est solide (noir de carbone) et peut donc être stocké, et commercialisé dans la limite des demandes du marché. L’hydrogène est sous forme gazeuse et peut être stocké après compression. Cependant, la molécule CH4 est particulièrement stable et il faut atteindre des températures de l’ordre de 1400 °C pour la décomposer avec un rendement proche de 100% en un temps suffisamment court. On utilise une torche à plasma électrique.
Une quatrième solution technique existe :
L’hydrogène bleu
Pour le «décarboner», une possibilité consiste à capter le dioxyde de carbone émis lors du vaporeformage. Ce CO2 peut alors être utilisé comme matière première dans certaines industries (pour la production de mousses par exemple). Mais la solution la plus fréquemment envisagée est celle du stockage géologique, dans d’anciennes poches de gaz ou de pétrole vides. Une technique appelée CSC (ou en anglais CCS pour Carbon Capture and Storage).
L’hydrogène ainsi décarboné est alors devenu « bleu ». Inutile de dire que l’opération supplémentaire est coûteuse, tant en euros ou en dollars qu’en énergie et qu’aujourd’hui il n’existe presque pas d’hydrogène bleu sur le marché. Seuls quelques projets pilotes ont été lancés dans le monde.
L’hydrogène jaune
Si cet hydrogène est produit par une proportion importante d’électricité d’origine nucléaire (comme en France), il se verra plutôt attribuer la couleur « jaune ». Problème : l’hydrogène « vert » ou même « jaune » est beaucoup plus cher que l’hydrogène gris fabriqué par vaporeformage. Son coût est aujourd’hui de 5 à 6 € par kg, soit environ 4 fois plus que l’hydrogène gris. Raison pour laquelle sa production mondiale est très marginale (moins de 5 % aujourd’hui).
Rendement médiocre ?
Autre obstacle de taille lorsque l’hydrogène vert ou jaune est envisagé comme solution de stockage de l’électricité d’origine renouvelable : le rendement de l’opération qui consiste à produire de l’hydrogène dans un électrolyseur, à le comprimer à très haute pression, éventuellement à le transporter, puis à fabriquer à nouveau de l’électricité dans une pile à combustible, est médiocre : de 25 à 30 %. Cela veut dire que plus des deux tiers de l’électricité renouvelable produite au départ se sont volatilisés dans l’opération, en pure perte. Alors que des solutions de stockage alternatives comme les batteries ont un rendement bien meilleur, d’environ 80 %, et sont même moins chères.
Il faut aussi maîtriser les risques, car l’hydrogène est un gaz très dangereux : comme il s’agit de la plus petite des molécules gazeuses, les risques de fuite sont plus importants qu’avec n’importe quel autre gaz. Il est en effet difficile de rendre complètement étanche les réservoirs et tuyauteries contenant de l’hydrogène surtout lorsque celui-ci est comprimé à très haute pression. Même si les industriels arrivent tant bien que mal à maîtriser ce problème, qu’en sera-t-il du consommateur moyen ?
La question de rendement de l’hydrogène risque d’être problématique : Sur cette question, il est dit plusieurs choses :- tout dépend du coût de l’électricité utilisé pour le fabriquer. S’il s’agit d’électricité en surplus provenant d’éoliennes et de panneaux solaires dont par définition la production ne peut être adaptée à la demande, il est marginal parce que cette l’électricité sera vendue à zéro euro, voire même à des prix négatifs. S’il s’agit d’électricité nucléaire en faisant fonctionner les centrales à 90% de leur capacité au lieu de 50%, là encore le coût est marginal.
L’hydrogène doit donc avant tout être utilisé comme un moyen de stocker de l’électricité quand cela est facile et peu coûteux, quand l’électricité produite n’est pas utilisée ou est perdue.- a contrario, concernant l’hydrogène produit à partir d’énergies renouvelables intermittentes, elles coûtent fort cher.D’autre part, il est fort peu probable que les entreprises qui envisagent cette solution, s’en tiennent à 20 ou 25 % du temps de travail pour leur activité (d’autant plus que ce serait très irrégulier puisque par exemple, l’éolien ne produit de l’électricité que 23% du temps) et qu’il faut s’attendre à ce qu’ellesfassent appel au réseau national pour les trois autres quarts du temps.
IL n’est pas sûr par ailleurs que le process d’électrolyse accepte des variations de tension et de courant (la fameuse variabilité du vent). Il semblerait étonnant qu’un électrolyseur accepte ce genre de variation ou d’arrêts-démarrages incessants. Ce qui est confirmé par la revue «Transitions et énergies» selon laquelle le fonctionnement des électrolyseurs s’adapte mal à la production intermittente éolienne et solaire. Le rendement des électrolyseurs baisse considérablement. Ce n’est donc pas réaliste.
En revanche, l’utilisation de l’énergie nucléaire, pilotable, pour fabriquer de l’hydrogène, paraît être la seule solution rationnelle.
C’est pourquoi l’option qui sera la plupart du temps retenue, c’est le nucléaire sous-utilisé : des installations d’électrolyse de l’eau sont peu à peu installées à côté des centrales nucléaires aux Etats- Unis et c’est une option retenue en France.
Il reste que l’hydrogène à l’état natif existe dans la nature. L’hydrogène naturel est effectivement produit par la terre : des sources ont été découvertes en différents endroits du globe, en particulier au Mali, près de Bamako, où un forage est tombé sur une poche d’hydrogène pur à 98 %. Cette réserve est aujourd’hui estimée à 1,5 milliards de m3. Et elle semble renouvelable !
Autre inconvénient : les risques d’explosion qui ne sont pas négligeables (voir plus haut)
Remarques
Bien que la gamme de solutions technologiques de stockage d’énergie électrique soit vaste, seule la filière STEP a atteint une véritable maturité « marché » à ce jour. Les STEP, répétons-le, représentent plus de 99 % de la puissance de stockage d’électricité connecté au réseau installée dans le monde. Mais il est bon de signaler que les STEP existantes ne peuvent satisfaire que 2 % des besoins de stockage pour parer à l’intermittence des EnR dans le monde.
Il convient de rappeler que la présentation succincte ci-dessus des techniques de stockage de l’énergie était faite dans la perspective de l’alimentation du réseau électrique national. Il serait par exemple envisageable, pour pallier le déficit d’énergie électrique intermittente, d’employer de très grosses batteries de grande capacité, de plusieurs mégawatts, jouxtant des éoliennes ou des panneaux photovoltaïques, mais le coût d’investissement en serait tellement élevé (et renchérirait singulièrement le coût de production lui-même déjà très élevé) que cela n‘est pas viable économiquement à l’échelle de notre pays. Cependant, ce serait intéressant pour des endroits isolés, comme dans une île.
De plus les solutions qui pourraient être techniquement au point présentent des difficultés d’ordre technique ou des contraintes environnementales : certaines installations prennent de la place en surface et en hauteur et… pourraient se heurter à une certaine contestation.
La chaleur renouvelable
Elle est stockable : Qu’elle soit produite ou récupérée, l’utilisation de la chaleur est souvent dépendante de la possibilité de la stocker.
Or, précisément l’avantage de la chaleur par rapport à l’électricité est qu’elle peut être stockée et que grâce à cela, elle est utilisable pour de nombreux usages, au point même de permettre la production d’électricité (voir à ce sujet le projet « Ultra-high temperature thermal energy storage » qu’une équipe franco-espagnole est en train de mettre au point).
Les différentes techniques de stockage de la chaleur
- Le stockage thermique sensible le plus connu est bien sûr le ballon d’eau chaude: on stocke depuis des décennies la chaleur sous forme d’eau chaude dans des ballons appelés cumulus (solaires, électriques ou thermodynamiques). isolés thermiquement.
- Le stockage d’eau chaude pressurisée : l’eau chaude d’un réseau de chaleur est stockée dans un réservoir « pressurisé », c’est-à-dire à une pression supérieure à la pression atmosphérique. Le caractère pressurisé du réservoir permet de stocker l’eau à des températures supérieures à 100 °C. Cela permet d’augmenter la température, donc la densité énergétique du moyen de stockage.
- Le stockage avec la paraffine : Il s’agit d’une solution de stockage thermique sous forme de chaleur latente basée sur l’utilisation de paraffine comme Matériau à Changement de Phase (MCP). Lors de la charge, l’énergie thermique est stockée durant la fusion de la paraffine. L’énergie thermique est ensuite récupérée durant la solidification de la paraffine lors de la décharge. Mais les coûts sont relativement importants comparés au stockage d’eau chaude par exemple.
Le stockage de la chaleur revêt un intérêt incontestable : celle-ci est produite en maintes occasions, mais n’est pas forcément récupérée. C’est le cas de la chaleur « fatale » (non utilisée, perdue) produite par les usines, ou différentes installations comme celle des serveurs informatiques ou d’unités de traitement de la biomasse, ou encore de solaire thermique… Cette contribution, comme celle de la chaleur d’origine géothermique, n’est pas très difficile à mettre en œuvre.
Un exemple de chaleur récupérée : à la centrale à concentration (tour d’énergie solaire) près de Ouarzazate au Maroc, les miroirs produisent une grande quantité de chaleur au point que cela permet de produire de l’électricité la nuit (6 à 7 heures).
Une mention particulière pour le stockage intersaisonnier de chaleur (ou STES pour Seasonal Thermal Energy Storage). C’est le stockage de chaleur ou de froid pour des périodes pouvant aller jusqu’à quelques mois.
Un bon exemple est celui de La Communauté solaire de Drake Landing, un écoqartier de 52 habitations individuelles situées dans l’Alberta au Canada grâce au solaire thermique (développé au chapitre « Géothermie ») où la chaleur collectée en été en sous-sol est restituée en hiver pour le chauffage.
De la même manière, une solution analogue est en train de se mettre en place en France avec la société NewHeat qui vient d’inaugurer Narbosol, une centrale solaire thermique consacrée à la fourniture de chaleur renouvelable au réseau de chauffage urbain de Narbonne.
Mieux encore et venant aussi du Canada, selon le même principe, les BTES : Des sondes géothermiques permettent de stocker la chaleur renouvelable en sous-sol (cette technique est également développée au chapitre « Géothermie ») La chaleur renouvelable et bas carbone peut être produite grâce à des panneaux solaires thermiques basse température. Elle est injectée en été dans le sous-sol, dans le BTES et stockée plusieurs mois pour répondre aux besoins énergétiques du bâtiment en hiver : la chaleur est durable dans les sondes, bien plus que dans un ballon d’eau chaude. On peut faire aussi du stockage à court terme.
Cela permet de valoriser les productions saisonnières en les stockant efficacement. Une fois ces sondes financées, c’est extrêmement économique.
Une autre solution de stockage inter-saisonnier est mise en œuvre dans une province d’Autriche qui ambitionne de couvrir la totalité des besoins de chauffage de cette manière. C’est l’utilisation de zoolithes.. Les zéolithes sont des minéraux poreux : leur squelette, constitué par un assemblage d’atomes, laisse apparaître des trous disposés régulièrement. Grâce à leur facilité d’hydratation et de déshydratation et leur stabilité structurale, elles peuvent reproduire indéfiniment le cycle d’adsorption/désorption et constituent des collecteurs efficaces pour le stockage de l’énergie solaire, notamment dans les maisons individuelles.
Le principe est relativement simple : en été, la chaleur issue des capteurs solaires thermiques est stockée par la zéolithe qui se déshydrate et libère l’eau stockée sous forme de vapeur d’eau. Cette condensation permet de récupérer une chaleur qui peut être employée pour l’eau chaude sanitaire. En hiver, c’est le phénomène inverse d’adsorption qui se produit. Les molécules d’eau se fixent sur la zéolithe et ce phénomène physique se traduit par un important dégagement de chaleur qui est restitué à un réseau de chauffage ou d’eau chaude sanitaire.
Les réseaux de chaleur renouvelable
La chaleur peut être stockée, nous venons de le voir. Encore faut-il qu’elle soit acheminée vers les endroits où on en a besoin. Il existe beaucoup de sources de production de chaleur pour lesquelles il n’existe pas (ou très peu) de système de récupération ni d’acheminement. Pour mémoire, ce sont :
• la filière biomasse (solide et gazeuse) ;
• la filière géothermie directe et/ou assistée par pompes à chaleur ;
• la filière solaire thermique ;
• la filière nucléaire (qui produit beaucoup de chaleur, ordinairement neutralisée par l’eau de la mer ou du cours d’eau voisins) ;
• la filière valorisation énergétique des déchets (critiquable, dans la mesure où l’incinération brûle de nombreux déchets plastiques. Peut-elle donc vraiment être qualifiée de renouvelable ?).
L’acheminement de cette chaleur, à laquelle s’ajoute celle produite par les industries, est, en tout état de cause, organisable, à telle enseigne que l’agglomération de Lille a programmé ce qu’elle appelle « l’autoroute de la chaleur » : il s’agit de 20 kilomètres de canalisations, où l’eau, transportée à 117 °, permettra de chauffer des logements, des bâtiments administratifs, des piscines…
Les réseaux de chaleur dans le sous-sol peuvent donc atteindre plusieurs kms de long, transportent la chaleur dès 50°C et la distribuent dans les villes.
Mais il existe aussi des boucles d’eau tempérée qui récupèrent la chaleur à très basse temperature (35°C) , provenant de sources diverses (voir au chapitre “géothermie”)
Il faut, au sujet de la production de chaleur, savoir que :
- la consommation finale de chaleur constitue en général, près de la moitié des usages énergétiques en France (environ 750 TWh, soit près de 45% de la demande totale d’énergie finale).
- En 2016, Le soutien des pouvoirs publics aux filières de chaleur était de 8 fois inférieur à celui consacré aux EnR électriques. Autrement dit, comme instrument de lutte contre le changement climatique, le kWh d’EnR chaleur est 30 à 40 fois moins soutenu par l’État que le kWh d’EnR électrique pour lutter contre le changement climatique.
Ce serait dans le domaine du stockage saisonnier de la chaleur qu’il serait nécessaire de porter l’effort à échelle industrielle.
Au total, la question du stockage de l’énergie électrique se pose encore aujourd’hui de manière aigue. Aucune solution ne s’impose de manière décisive, et toutes s’avèrent coûteuses. Mais les solutions de chaleur renouvelable mériteraient un soutien bien plus important, car elles sont plus fiables, puisqu’elles peuvent se compléter pour tirer profit de leurs avantages respectifs.
La « mobilité » électrique
Pour remplacer les voitures à essence (ou au fuel), on a surtout pour l’instant envisagé le moteur électrique à batterie.
Les batteries, de ce fait, semblent devoir connaître un développement important, malgré leur prix encore très élevé. Pour pallier cet inconvénient, les pouvoirs publics favorisent l’essor de la voiture électrique par des subventions qu’on pourrait qualifier d’exceptionnelles. Le territoire se couvre peu à peu de stations coûteuses de recharge des batteries, subventionnées par le gouvernement et les régions. L’avantage est la diminution du recours aux hydrocarbures dans les villes, afin de diminuer la pollution atmosphérique qui tue (un objectif écologique majeur), mais quid du recyclage des batteries, de l’utilisation des métaux rares de la planète, des émissions électromagnétiques de la batterie en situation de recharge? Ce sont des questions que se posent parfois les constructeurs eux-mêmes. Comment faire en sorte que le recyclage d’une batterie ne soit pas un désastre écologique ?
A supposer que ces questions soient résolues, combien de centrales électriques supplémentaires faudra-t-il pour fournir en électricité la recharge de ces batteries ? On connaît la réponse : pour unmillion de voiture, c’est l’équivalent de la production d’une centrale nucléaire. Or, il y a actuellement en France 38 millions de véhicules.
Sans compter un autre problème qui pourrait paraître accessoire : les usagers ne manqueront pas de recharger la batterie de leur véhicule le soir. De ce fait, comment gérer la production d’électricité aux heures de pointe du soir et du début de la nuit ? D’après les calculs du Cérémé, « 30 millions de VL électriques se rechargeant en même temps à 19 h, même lentement à 3 kW, appelleraient une puissance supplémentaire de 90 GW, soit presque le double de la demande de pointe actuelle. » Cela risque d’être bien délicat : le risque de black-out s’en trouverait singulièrement renforcé. De plus, l’objectif de maints plans pluriannuels de l’énergie qui consiste à produire moins d’électricité risque fort de ne jamais être atteint.
Cependant, les difficultés principales tiennent à l’accueil qu’en font les consommateurs : pourquoi désireraient-ils acheter un véhicule plus cher (malgré les aides) dont les fonctionnalités sont inférieures à celui qu’ils possèdent (temps de recharge des batteries, entre autres)? En cause, le coût de la batterie qui constitue 40 % de la valeur d’un véhicule, ce qui ne s’améliorera pas rapidement. Il est par ailleurs assez dur de s’imaginer le regard vissé sur la jauge de niveau de charge de la batterie (car en effet l’autonomie proposée actuellement est faible, sans compter que la recharge n’est pas simple, les systèmes n’étant pas tous identiques). Les véhicules électriques sont sensiblement moins fiables que les thermiques et cela restera vrai un bon bout de temps. Et pourtant, c’est la solution que les gouvernements entendent imposer.
Ce que nous en dit Reporterre (2021) n’est pas encourageant : « Un point fait consensus : produire un véhicule électrique demande beaucoup plus d’énergie, et émet deux fois plus de gaz à effet de serre que de produire un véhicule thermique, du fait de la production de sa batterie et de sa motorisation…
Les experts du cabinet de conseil écolo Carbone 4 défendent le véhicule électrique, considérant qu’une électrique de petite taille est moins émettrice de CO2 à partir de 30.000 ou 40.000 kilomètres parcourus — ayant dès lors « compensé » sa fabrication…(sous réserve) d’« une production de batteries n’utilisant aucune électricité d’origine fossile, ce qui n’est pas encore la norme, mais pourrait le devenir dans un futur proche. »…
Tout se passe donc comme si le pacte implicite de la voiture électrique était le suivant : pour espérer une réduction des émissions de CO2, qui repose elle-même sur une série d’hypothèses fragiles — petites voitures, allongement de la durée de vie des batteries, généralisation des énergies renouvelables —, ainsi qu’une réduction de la pollution et du bruit dans les villes, il faut générer d’autres pollutions, ailleurs. Pour Alma Dufour, des Amis de la Terre, cela pose un sérieux problème de justice sociale : « La question de l’accès à l’eau dans les régions du monde qui subissent de plein fouet le changement climatique est aussi importante que les émissions de CO2. »
Il s’ajoute donc de sérieuses raisons écologiques : un véhicule électrique produit pour sa fabrication deux fois plus de CO2 qu’un véhicule thermique (par la suite, en roulant, il devient plus écologique et « rattrape » le véhicule thermique après un kilométrage allant de 15 000 à plus de 300 000 km en fonction de l’origine de l’électricité, verte ou autre (en France, c’est 50 000 km). Mais surtout, la fabrication de batteries requiert des métaux rares dont les conditions d’extraction sont souvent désastreuses. Pour ne citer qu’un exemple, le cobalt vient surtout de la République Démocratique du Congo où 40 000 enfants seraient employés pour son extraction.
Ce que nous en dit Reporterre n’est pas pour nous rassurer :
Cette question, d’ailleurs, est préoccupante : car que ce soit pour les téléphones portables, l’éolien, les voitures électriques ou les véhicules à hydrogène, il faut beaucoup de minerais. Cobalt, graphite,
lithium, cuivre ou nickel…… leur extraction croissante peut « engendrer des atteintes à l’environnement et aux droits humains », alerte l’ONG Sherpa dans un rapport paru jeudi 29 octobre : travail forcé des enfants, pollution des eaux par des produits toxiques, destruction d’espèces protégées. La liste est longue et noircit le tableau d’une transition écologique verte et propre.
« La transition énergétique fait augmenter de manière significative la demande en minerais », confirme Jean François, juriste au sein de l’ONG Sherpa. Ainsi, l’éolien nécessite de l’aluminium, du chrome, du cuivre, du fer, du plomb, du zinc, du manganèse, du nickel, du molybdène et du néodyme. Pas moins de onze minerais sont également nécessaires pour fabriquer des batteries électriques. Et notre gourmandise minérale n’est pas prête de s’atténuer : pour les batteries des véhicules électriques et le stockage de l’énergie, l’Union européenne aurait besoin, en 2050, de près de soixante fois plus de lithium et de quinze fois plus de cobalt. Selon la Banque mondiale, dans un scénario de limitation du réchauffement à 2°C par rapport à l’ère préindustrielle, la demande en graphite – qui entre dans la composition de certaines batteries – pourrait augmenter de plus de 400 %. »
Reporterre 29 octobre 2020
Cette gloutonnerie qui vient des milieux d’affaires est dommageable : nous sommes dans une transition basée sur la technologie et la consommation de ressources, alors qu’il faudrait la fonder sur la sobriété.
« Dans ces régions parmi les plus arides au monde, les mines de lithium évaporent à grande allure les rares ressources en eau. Sur le site d’Atacama, au Chili, les miniers prélèvent près de 200 millions de litres par jour. Le pompage de la saumure du sous-sol riche en lithium crée un vide qui fait migrer vers les profondeurs l’eau douce disponible. Cette double perte d’eau abaisse le niveau de la nappe phréatique, assèche le sol et la végétation au détriment des animaux, des cultures et des gens », expliquent les Qollas (ethnie locale, NDLR). À quoi s’ajoutent les traitements au chlore et la dispersion dans les eaux des déchets de pompage mêlés à des solvants, qui détruisent des micro-organismes dont on ne sait pas grand-chose, sinon qu’ils sont les organismes vivants les plus anciens de la planète. Or toutes les mines actuellement en production annoncent un doublement ou un triplement de leurs activités pour se positionner sur le marché du lithium, dont la demande pourrait croître de 18 % par an d’ici à 2025. (Reporterre 2021)
Pour des questions d’échelles, de coût de fabrication, d’utilisation intensive de matières premières, les batteries ne sont pas à la hauteur des enjeux. Pour donner un ordre d’idée, la production annuelle mondiale de lithium ne permettrait même pas de fabriquer le nombre de batteries nécessaire pour stocker une semaine de consommation d’électricité française. Et il faut retirer 50 kilos de matériaux du sol pour fabriquer un kilo de batterie ! La copie est à revoir, semble-t-il.
La mobilité « hydrogène »
Cette solution mérite qu’on s’y attarde quelque peu, car les appréciations sur l’avenir de cette filière sont très divergentes. Des experts lui attribuent souvent un grand avenir. D’autres spécialistes restent très sceptiques. Alors qu’aujourd’hui existent déjà des flottes dites « captives » de taxis ou de voitures de services, et que des trains en Allemagne roulent à l’hydrogène, cette solution semble bien être l’une des plus écologiques, puisque le seul déchet que rejette un véhicule à hydrogène est de l’eau.
La première complication, nous l’avons vu plus haut, c’est que ce gaz est explosif et que les installations de stockage-recharge des véhicules (de type Seveso) sont très coûteuses (il faut compter plusieurs centaines de milliers d’euros, voire un million ou plus, selon la taille) et encore bien plus pour les unités de stockage industrielles. Il y a aussi, pour les voitures, des problèmes techniques dont les solutions restent aujourd’hui très coûteuses, entre autres le réservoir, car l’hydrogène se diffuse aisément au travers de beaucoup de matériaux usuels, à quoi s’ajoute le poids du véhicule.
Deuxième problématique, l’hydrogène commercialisé aujourd’hui est produit à 95 % en émettant des gaz à effet de serre (par vaporeformage de gaz méthane) et rejette dans l’atmosphère 11 kilos de CO2 pour 1 kilo d’hydrogène » produit. La solution propre, l’hydrogène vert, coûte actuellement trois à quatre fois plus cher que la méthode « sale ».
A supposer qu’on passe à la phase (coûteuse) d’industrialisation du stockage de masse qui permettrait d’abaisser ensuite un peu les coûts, il reste qu’en aval, les véhicules utilisant la pile à combustible nécessitent des stations de recharge onéreuses et sont eux-mêmes très chers malgré un effort très important en recherche et développement.
Autre inconvénient : pour transporter l’hydrogène, il faut le comprimer, sinon, avec une voiture, à pression atmosphérique, pour faire 400 km, il faudrait un réservoir de 44 m3 !
Ensuite, une fois compressé, il faut le transporter et là, nouveau problème ! La perméation de l’acier à 700 bars est importante, ce qui sous-entend qu’on ne peut stocker que peu de temps sous peine de perte. Et donc si pour la mobilité, on peut le faire, pour des usages industriels, il faudra soit passer par une méthanation, soit construire localement une unité H2.
Tout cela explique qu’après avoir commencé à investir dans les véhicules à hydrogène, certains constructeurs semblent avoir changé leur fusil d’épaule au printemps de 2019 : le PDG de Volkswagen, l’Autrichien Herbert Diess, a affirmé lors de la conférence de presse annuelle du groupe, le 12 mars 2019 : « Il n’y a pas d’alternative à la voiture à batterie pour les décennies qui viennent… L’hydrogène est moins efficient ». BMW, Daimler et VolksWagen se sont mis d’accord, le 21 mars de cette même année pour « faire la transition vers la mobilité verte » en mettant l’accent sur les voitures à batterie et hybrides et non pas sur les véhicules à pile à combustible, « qui ne seront pas prêts avant de nombreuses années ». (Source : magazine Reporterre, avril 2019).
Le chemin risque d’être long et ardu. Les solutions hydrogène risquent fort de ne se développer que lentement. Elles sont en quelque sorte mises de côté au profit de la mobilité (à batterie) électrique. Celle-ci n’est pas forcément la meilleure solution, car la fabrication de batteries est, comme nous l’avons vu plus haut, tellement émettrice de CO2 qu’il faut avoir roulé entre 35 000 et 300 000 (selon que dans le pays d’utilisation, l’électricité aura été produite de manière « propre » ou non) pour polluer moins qu’avec une voiture thermique. Mais apparemment, à l’exception de quelques constructeurs, c’est ce qui va se passer puisqu’en Europe, est maintenant programmée la construction de nombreuses usines de fabrication de batteries (opération appelée « Airbus des batteries »).
Cependant, après la crise du Covid-19, il semble bien que l’Allemagne soit décidée à soutenir un effort significatif pour le développement de l’hydrogène, et que la France soit décidée à lui emboîter le pas.
Le gouvernement français a détaillé son plan de sept milliards d’euros sur dix ans pour développer à grande échelle l’hydrogène, qui peut servir à rendre plus « propres » certaines activités.
Deux milliards d’euros en 2021-2022 pour décarboner les usages industriels, alors que de nombreux secteurs utilisent aujourd’hui un hydrogène d’origine fossile (hydrogène gris), produit avec des procédés fortement émetteurs de gaz à effet de serre.
L’hydrogène peut devenir « propre » en étant notamment produit par électrolyse de l’eau, à condition d’utiliser une électricité issue de sources faiblement carbonées fiables et constantes. L’objectif est d’installer 6,5 gigawatts d’électrolyseurs en 2030.
Les mobilités « lourdes » visées
Il est question également de développer une offre de mobilités « lourdes », c’est-à-dire pour des camions, des trains en zone non-électrifiée, voire l’avion (le souhait, en 2035 avoir un avion neutre en carbone utilisant l’hydrogène). Au total le gouvernement vise sixmillions de tonnes de CO2 économisées en 2030 (il faut rappeler qu’en 2019, la France a émis au total 441 millions de t de CO2).
Le dernier volet du plan porte sur la recherche, l’innovation et le développement des compétences.
Conclusion sur la mobilité
La solution du stockage de l’énergie par batterie connaît beaucoup moins de progrès que ne l’espéraient les chercheurs. La batterie la plus efficace actuellement, celle au lithium, se heurte à un inconvénient majeur: les ressources mondiales pourraient être suffisantes si suffisamment de mines étaient ouvertes, ce qui n’est pas le cas. Or le délai entre la décision d’en ouvrir une et le début de l’exploitation est élevé : pas loin de 10 ans, ce d’autant plus que les populations n’acceptent pas facilement ce type d’activité qui est susceptible de modifier sensiblement le milieu naturel, voire de le détériorer (cf. la résistance opposée par la population de la commune de Montalegre, au nord-est du Portugal, tout près de la frontière espagnole). De même, un projet en Serbie rencontre une très forte opposition.
Anecdotiquement, il suffirait de quelques dizaines d’installations géothermiques profondes, en particulier en Alsace, pour récupérer chaque année dans la roche extraite suffisamment de lithium pour les besoins nationaux. Ainsi on ferait d’une pierre deux coups.
Les recherches pour d’autres types de batteries tardent à donner des résultats. Peut-on en espérer avant 2030 ?
Pour cette raison, la mobilité électrique nous semble ne pas devoir connaître l’essor rapide annoncé par les milieux officiels.
Les véhicules à hydrogène nécessitent eux aussi des métaux dont les réserves sont peu abondantes comme le magnésium (il en faudrait 70 kg pour chaque réservoir) et d’autres encore, ce qui engendrerait, à plus grande échelle des tensions sur la production des métaux rares.
Que dit le think-tank Cérémé sur le développement de la mobilité électrique et/ou à hydrogène ?
Le véhicule électrique
Il est adapté aux trajets courts. De ce fait, beaucoup de ménages périurbains ou ruraux auront besoin de deux véhicules : l’un 100% électrique pour les trajets locaux, l’autre, hybride par exemple, pour les trajets de longue distance (vacances notamment). Cependant, tous les ménages ont-ils les moyens de s’offrir deux véhicules ?
La pile à combustible alliée au vecteur hydrogène
Cette solution est convenable au point de vue des émissions de CO2, puisqu’elle émet seulement de la vapeur d’eau. En outre, une pile à combustible comporte moins de composants critiques que les batteries.
Mais la production d’hydrogène et la distribution en stations-service sont très coûteuses. Le choix, coûteux, fait par les gouvernements, de la solution « à batterie » interdit pratiquement le développement de cette deuxième solution et la cantonne à des solutions de « niche » qui ne sont pas sans intérêt :
- des flottes publiques ou privées à déploiement local, s’appuyant sur une production locale d’hydrogène.
- pour les poids lourds : sur de grands axes autoroutiers munis de stations-services disposant d’installations sécurisées.
- pour le ferroviaire : le réseau TER une fois muni des installations sécurisées nécessaires.
Les véhicules hybrides, éventuellement rechargeables
Dans cette solution hybride thermique-électrique, le moteur thermique fonctionne avec un minimum de carburant. Il apparaît ainsi comme la solution de masse la plus rationnelle, le meilleur compromis en ce qu’il consomme peu de carburant et que de plus, ce carburant aujourd’hui d’origine fossile peut par la suite être remplacé par des carburants d’origine décarbonée.
Nous pourrions ajouter qu’un véhicule rechargeable peut fonctionner presque exclusivement à l’électricité pendant la semaine et ne fonctionner avec du carburant que le week-end…
Cependant les constructeurs, soumis à la pression médiatique et soucieux de leur image verte, ébranlés par les décisions de l’UE – relayées par des gouvernements suiveurs – visant à ne plus vendre le moindre véhicule thermique neuf à partir de 2035, laissent entendre qu’ils sont prêts à abandonner également la solution de l’hybride rechargeable au profit du 100% électrique.
La solution « véhicules hybrides, éventuellement rechargeables » devrait faire partie, au regard des usages et de la protection de l’environnement, du bouquet des solutions les plus soutenables. Pourtant, les décisions de l’UE ne lui laissent pas d’avenir significatif.
Un tel bouquet non seulement ne nécessiterait pas la construction de réseaux démesurés, mais éviterait de dévaster les zones de la planète productrices de métaux rares, en particulier cobalt et lithium avec tous les risques pour la ressource en eau et pour la protection de la biodiversité qui y sont localement associés.
Pour résumer ce long passage sur le stockage de l’énergie, Le stockage de l’électricité à très grande échelle : techniquement possible, mais sans modèle économique viable en vue…
Conclusion sur les énergies renouvelables intermittentes
On l’aura compris : les énergies renouvelables les plus connues, les plus fréquemment évoquées, comportent un inconvénient majeur : l’intermittence. Inconvénient auquel il est particulièrement difficile de remédier, en l’absence de solutions de stockage viables à l’échelle d’une nation.
Les pays qui, comme l’Allemagne, la Belgique, l’Espagne… et aux USA, la Californie, ont décidé d’abandonner le nucléaire et de faire le pari du renouvelable (qui produit environ un tiers de l’électricité via d’immenses champs de panneaux solaires et d’éoliennes), ont des systèmes énergétiques qui sont à la peine. Pendant les périodes de canicule, en Californie, par exemple, en raison de la faiblesse des vents et des performances réduites des panneaux photovoltaïques, la production d’électricité baisse sensiblement, alors que la consommation augmente avec l’usage massif des climatiseurs. Les opérateurs sont alors obligés de procéder à des coupures de courant d’urgence pour éviter un effondrement du réseau, et celasans prévenir les consommateurs.
Les systèmes électriques en question ne tiennent aujourd’hui que grâce aux centrales à gaz, une source mobilisable à la demande.
Dans un certain nombre de pays, a contrario, durant le confinement, la consommation d’électricité a baissé de 20% et parfois plus. Cela a entraîné des conséquences inattendues : en France, par exemple, en mai 2020, le réseau national électrique a demandé à de nombreux producteurs de couper en urgence l’alimentation provenant de centrales éoliennes et solaires qui présentait «un risque significatif de disruption de la sécurité del’approvisionnement».
On peut donc remarquer que la surabondance d’électricité renouvelable, tout comme sa pénurie, risque de provoquer un blackout et un effondrement de tout le système électrique d’un pays.
Sur ces sources d’énergie, notre conclusion, nous l’emprunterons au livre « Ecologie sans transition » publié aux éditions Divergences par le groupe Désobéissance écolo Paris, dont voici un extrait.
« Les énergies renouvelables ont le fâcheux défaut de dépendre des cycles et des contraintes naturelles : on les dit intermittentes. Contrairement aux énergies fossiles, elles ne conviennent pas à une économie en croissance dont les flux doivent être stables. En outre, pour que les dispositifs decaptation d’énergie renouvelable soient rentables et pour qu’ils puissent être pilotés informatiquement, il faut extraire et utiliser des métaux rares. Or l’industrie minière provoque des pollutions et inflige des conditions de vie et de travail intolérables aux populations qui ont le malheur d’avoir ces minerais sous leurs pieds. Enfin, quand des éoliennes, des panneaux solaires ou des centrales à biomasse sont installés à une échelle industrielle, c’est toujours, de manière absolument anti-écologique, au mépris des habitant·es et des paysages qui subissent leurs nuisances, et du contrôle démocratique que l’on devrait exercer sur la production et la distribution de l’énergie. De sorte que, pour l’instant, ce qui est « renouvelable », c’est surtout l’exploitation des humains et des milieux vivants. »
Dans le même ordre d’idées, on pourrait ajouter le commentaire fait par Jean-Paul Oury sur le film récent produit par Michael Moore
« Les énergies dites renouvelables (solaire, éolien et biomasse) sont sans doute la plus grosse escroquerie de tous les temps et ceux qui en ont fait l’apologie sont, soit des pigeons qui se sont fait berner (les militants écologistes), soit de cyniques entrepreneurs qui ont profité de la situation et de la naïveté de certains militants de bonne foi pour s’enrichir. Ce dernier point est d’ailleurs la conclusion de ce film : toute cette entreprise de transition énergétique n’est qu’une vaste fumisterie menée tambour battant par des entreprises dont la plupart ont des intérêts dans l’utilisation d’énergies fossiles. Aussi, comme le montre Gibbs à plusieurs reprises, il semble totalement impossible de se passer des énergies fossiles (qui représentent 85 % de la demande d’énergie) quand on a recours aux énergies renouvelables. »
Fort heureusement, d’autres sources d’énergie renouvelables existent qui sont souvent peu connues … excepté l’hydroélectricité qui est très exploitée : ce sont des sources d’énergie pilotables, réglables et pérennes
Le rôle majeur dans « la transition énergétique » de l’hydrogène dit bleu ressort du rappel ( le 26 octobre) dans le magazine « transitions et énergies » : »Il ne sera pas possible de limiter la présence de CO2 dans l’atmosphère sans capture et stockage des émissions de carbone provenant notamment de l’industrie. Le GIEC, y compris dans son dernier rapport, l’Agence internationale de l’énergie, le World Economic Forum, l’Académie des sciences américaine ou l’Imperial College de Londres prônent le développement et le recours massif à cette technologie. ». On peut aussi se référer à l' »exposé participatif » sur l’hydrogène tenu le 9 septembre à Rabastens. Celui-ci a été enregistré : voir dans l’entrée « énergies » du site sepra 81.