La programmation pluriannuelle de l’énergie est un document de programmation qui détermine les modalités d’action des pouvoirs publics pour la gestion de l’ensemble des formes d’énergie sur le territoire métropolitain continental. Il a été soumis à consultation publique jusqu’au 5 avril. Bruno Ladsous décrypte (en quelques épisodes les enjeux de ce document).
ACTE II – janvier 2025 à avril 2025
Rappel de l’épisode précédent :
- 2022-2023 : deux années perdues en consultations
- 2024 : émoi au ministère – lancement précipité d’une PPE 3
Janvier 2025 : annonce d’un décret PPE3 précédé d’une consultation du public
Pourquoi un décret ?
Les fonctionnaires ont convaincu leurs ministres que ce n’est pas de leur faute s’il n’y a pas eu de loi de programmation avant l’échéance du 1er juillet 2023 prévue part l’article L 100-1-A du Code de l’énergie, et que par conséquent un simple décret pourrait régler la question, fondé sur l’article L 141-1 du Code de l’Energie. Ils oublient de leur préciser qu’il existe dans ce L 141-1 un « ainsi que » qui oblige à en passer par une loi de programmation :
La programmation pluriannuelle de l’énergie, fixée par décret, définit les modalités d’action des pouvoirs publics pour la gestion de l’ensemble des formes d’énergie sur le territoire métropolitain continental, afin d’atteindre les objectifs définis aux articles L. 100-1, L. 100-2 et L. 100-4 du présent code ainsi que par la loi prévue à l’article L. 100-1 A.
Un dossier justificatif d’une rare indigence technico-économique et environnementale :
- Aucune utilisation des 360 cahiers d’acteurs, d’une grande qualité, déposés dans la phase précédente.
- Absence de documentation sur les objectifs de la consommation totale d’énergies (EF) : ni répartis par secteurs (on attend la SNBC paraît-il), ni consolidés, ni réalistes
- Absence de bouclage technique entre la demande d’énergies et l’offre d’énergies, et aucune justification du niveau d’électrification des usages de l’énergie qui est avancé
- Un empilement de solutions de production qui ne sont pas les plus efficaces au plan technique
- Insuffisance des capacités de stockage et de flexibilités (mix électrique)
- Aucun chiffrage économique
- Une évaluation environnementale très insuffisante.
Mars 2025 : des élus de la République et des experts montent au créneau
163 Sénateurs écrivent au premier Ministre :
Le dossier à l’appui du projet de décret nous apparait incohérent en termes de chiffrages, insuffisamment documenté au niveau des choix proposés, fragile sur le plan de la demande d’énergie et l’offre, indigent sur le chiffrage économique d’ensemble et de détail. En outre son évaluation environnementale est déficiente.
Ce projet de décret se présente tout au plus comme un empilement de solutions de production, un saupoudrage en réponse aux pressions des différentes filières, sans aucune vision globale et avec des effets négatifs pour de nombreuses années pour les particuliers comme pour les entreprises.
.. Nous vous demandons de renoncer à la publication de ce décret et à reprendre le travail collectif initié au Sénat pour permettre au Parlement de voter sur le futur mix énergétique. Sur un sujet aussi majeur pour l’avenir de notre pays il nous semblerait totalement inconcevable que la représentation nationale soit ignorée.
Des Députés de tous horizons politiques déposent un amendement à la Loi de Simplification en proposant une Loi de programmation à déposer d’ici juin 2026. L’Académie des Sciences émet un avis mentionnant notamment que :
Le texte actuel n’est pas à la hauteur des enjeux de l’énergie, d’une importance extrême pour la France et ses citoyens. Il n’a pas non plus le niveau de rigueur attendu d’une production des services de l’État.
D’autres voies nombreuses s’élèvent => pour temporiser, le Premier Ministre promet un débat au Parlement, mais un débat sans vote.