Le livre sur les énergies renouvelables (l’énergie hydroélectrique)

Une étape supplémentaire de la publication en ligne de l’ouvrage consacré aux énergies renouvelables. Rédigé par la commission énergie du collectif Toutes Nos Énergies – Occitanie Environnement, il est coordonné par Marcel Caron.
Plusieurs d’entre vous ont déjà fait des remarques et des commentaires. Merci de votre intérêt et de vos suggestions. Les auteurs en tiendront compte et les intègreront dans la version finale.

Voici la deuxième partie du chapitre sur les énergies pilotables :  l’énergie hydroélectrique qui est perçue favorablement dans l’opinion qui se souvient peu des impacts sociaux et environnementaux du passé.  (PDF)

Chapitre 3 Les énergies renouvelables pilotables

2ième partie  L’énergie hydroélectrique

L’hydroélectricité est perçue favorablement dans l’opinion qui se souvient peu des impacts sociaux et environnementaux du passé. 

L’énergie hydroélectrique, ou hydroélectricité, est une énergie  renouvelable qui est issue de la conversion de l’énergie hydraulique en électricité. L’énergie cinétique du courant d’eau, naturel ou généré par la différence de niveau, est transformée en énergie mécanique par une turbine hydraulique, puis en énergie électrique (énergie finale) par une génératrice électrique synchrone.

En 2017, l’énergie hydroélectrique représentait 16,6 % de la production mondiale d’électricité ; elle possède de nombreux atouts : Cette  énergie renouvelable, d’un faible coût d’exploitation est responsable de la plus  faible émission de gaz à effet de serre de toutes les EnR ; la capacité de stockage de ses réservoirs permet de compenser les variations de la demande ainsi que celles des énergies intermittentes. Les installations hydroélectriques ne sont pas destinées à la seule production d’énergie mais permettent d’autres usages, tels que l’alimentation en eau potable, l’irrigation des terres agricoles ou la navigation marchande ou récréative.

Elles présentent toutefois des impacts sociaux et environnementaux à la construction  : déplacements de population, éventuellement inondations de terres agricoles, modifications des écosystèmes aquatique et terrestre, blocage des alluvions, etc… Et si les risques d’accidents sont minimes,  ils peuvent être très dangereux. D’autres inconvénients peuvent être  les conflits d’usages entre l’hydroélectricité et le tourisme nautique, ou la perte des possibilités d’irrigation en aval des barrages …

Ses formes de production principales :  

  • les centrales dites gravitaires, ainsi nommées car les apports d’eau dans leur réservoir ou leur prise d’eau sont essentiellement issus de cours d’eau par gravitation, telles que les centrales au fil de l’eau ou les centrales hydroélectriques de lac ;
  • les stations de transfert d’énergie par pompage (S-T-E-P), aussi connues sous l’appellation « centrales hydrauliques à réserve pompée » ou « centrale de pompage-turbinage », dans lesquelles des turbines réversibles pompent l’eau d’un bassin inférieur vers un bassin supérieur (pompage durant le creux de la demande à partir d’électricité produite par des équipements de base)… (NDLR : ce qui a pour avantage de rendre à nouveau l’eau disponible pour la production d’électricité).  Le pompage-turbinage peut aussi se faire dans des conduites séparées comme dans le cas d’espèce ci-dessous.
  • les usines marémotrices, qui utilisent l’énergie du mouvement des mers, qu’il s’agisse du flux alterné des marées (marémotrice au sens strict), des courants marins permanents (hydroliennes au sens strict) ou du mouvement des vagues.

La proportion d’énergie hydroélectrique produite est moindre que celle de la puissance installée (voir ci-dessous).

 Elle représente 16 % de la production électrique mondiale en 2015 (contre 20,9 % en 1973). Précisons aussi que pour la France, la production hydroélectrique atteint 63,8 TWh en 2012, soit 11,8% de la production totale d’électricité. En fin 2012, la puissance installée était de 25,4 GW, ce qui représente 20% des capacités électriques françaises.

La France s’est donné pour objectif (dans le cadre du Grenelle Environnement), d’accroître la production de 5 TWh d’ici à 2020 et d’augmenter les moyens de pointe de 3 000 MW. 

Objectifs quantitatifs et orientations fixés par la Programmation Plurianuelle de l’Énergie (PPE). 

  • Augmenter la capacité de production hydroélectrique de 500 à 750 MW et la production de 2 à 3 TWh d’ici 2023.
  • Préserver la capacité de flexibilité de l’hydroélectricité, essentielle pour contribuer à la flexibilité du système électrique et faciliter l’intégration de capacités accrues d’énergies renouvelables.
  • Évaluer les pertes de production liées aux actions de rétablissement de la continuité écologique et optimiser autant que possible la conciliation des enjeux de préservation des milieux et de production d’énergie renouvelable.
  • Relancer le développement de l’hydroélectricité par des appels d’offres réguliers et par l’optimisation des concessions existantes.
  • Engager d’ici 2023 des projets de stockage sous forme de STEP, en vue d’un développement de 1 à 2 GW de capacités entre 2025 et 2030. (Actuellement, en France, 5 GW existants) 

Ajoutons qu’en France, la production hydroélectrique représente 70% de la production d’électricité à partir de sources renouvelables. 

La production est inférieure aux capacités, parce qu’elle est chargée d’assurer l’équilibre instantané entre la production et la consommation d’électricité et la substitution aux renouvelables quand il n’y a pas de vent et/ou de soleil. En effet, l’énergie hydroélectrique est, grâce à sa souplesse (mobilisable en quelques minutes), une variable d’ajustement indispensable, l’énergie du réseau électrique français ne pouvant pas se stocker, en l’état actuel des choses. Les équipements de pointe dont il est question un peu plus haut sont des centrales de forte puissance, très équipées sur le plan technologique, à même d’intervenir à la seconde près en cas de souci sur le réseau de distribution, pour éviter les black-out, en particulier le soir aux alentours de 19 H. 

Tout cela est très fiable : Malgré des coûts de mise en œuvre généralement élevés, les coûts de maintenance sont raisonnables, les installations sont prévues pour durer très longtemps. Il n’y a pas de coût de combustible et l’énergie de l’eau est renouvelable si elle est bien gérée. 

L’hydroélectricité peut poser néanmoins des problèmes : par exemple, ceux liés au climat peuvent avoir des répercussions importantes, à savoir la baisse répétée, ces dernières années, de la production due à un manque de précipitations, à une évaporation plus importante et à un assèchement consécutif de ses réservoirs. Le bilan mensuel du gestionnaire du réseau à haute tension (RTE), publié le 11 juin 2018, met en évidence le printemps particulièrement sec que la France a connu, celui de2017.

Entre avril et juin 2017, la sécheresse a fait considérablement chuter la production d’énergie hydroélectrique, et a vu le niveau des réservoirs baisser de manière significative : une baisse de 35,5% au mois d’avril, et de 28,7% au mois de juin de cette année par rapport aux mêmes mois en 2016.

La baisse des précipitations n’a cependant pas été spectaculaire, mais on note depuis quelque temps un effet cumulatif : la période de chaleur s’accompagne d’une augmentation de la consommation d’eau, et part d’un niveau des lacs déjà plus bas, donc avec des stocks d’eau inférieur à la moyenne historique.

C’est un phénomène qui touche beaucoup de pays, et pas seulement l’Europe.

 Impact social et environnemental

Les impacts environnementaux varient avec le type et la taille de la structure mise en place : ils sont faibles s’il s’agit d’exploiter les chutes d’eau naturelles, les courants marins, les vagues, mais ils deviennent très importants s’il s’agit de créer des barrages et des retenues d’eau artificielles.

Dans ce cas, on est obligé de déplacer des populations et d’abandonner des terres agricoles souvent fertiles, les rivières et les fleuves étant des lieux privilégiés pour y vivre et implanter des habitations. Par exemple, le barrage des Trois Gorges en Chine a entraîné le déplacement de près de deux millions de personnes. Bien sûr, en France, le nombre de personnes touchées a été bien moindre, mais cela explique la difficulté à mettre en place de nouveaux barrages-lacs et la tendance à développer les centrales au fil de l’eau. De fait, il est pratiquement impossible dans notre pays de programmer de nouveaux barrages-lacs.

De même, la faune, et pas seulement aquatique, est perturbée (bien que des dispositifs comme les passes à poissons soient installés), ainsi que tout l’écosystème environnant.

Ceci dit, la plupart des barrages ont été construits il y a plusieurs dizaines d’années et une nouvelle biodiversité a reconquis les lieux, qui sont parfois devenus source de développement économique et lieux d’attraction touristique (ex Lac du Salagou dans l’Hérault).  

Les installations hydroélectriques ne sont pas destinées à la seule production d’énergie mais permettent d’autres usages, tels que l’alimentation en eau potable, l’irrigation des terres agricoles ou la navigation marchande ou récréative.

L’hydroélectricité « au fil de l’eau »

Les installations de ce type sont implantées sur le cours de grands fleuves ou de grandes rivières. Elles sont caractérisées par un débit très fort et un dénivelé faible avec une chute de moins de 30 m. Dans ce cas, il n’y a pas de retenue d’eau et l’électricité est produite en temps réel. (elle n’est pas stockée comme dans le cas précédent).

De ce fait, il n’y a pas de possibilité de la stocker durant les périodes de l’année de hauts débits pour pouvoir déstocker en période de basses eaux.

Cette production varie fortement en fonction des événements climatiques (pluies, sécheresses, saisons, etc.). Elle fait partie, comme les éoliennes et le solaire, des énergies renouvelables à production dite « fatale » au sens où elle doit être consommée instantanément au moment de sa production, en l’absence de capacité de stockage.

En contrepartie, elle ne nécessite que des aménagements simples et beaucoup moins coûteux que les centrales de plus forte puissance.

On définit généralement les centrales dites « au fil de l’eau » comme étant celles dont la constante de vidage (temps théorique nécessaire pour écouler la réserve d’eau en turbinant au maximum) est inférieure à 2 heures. Leur production est maximale durant la période de fonte des neiges, c’est-à-dire au printemps, mais elle connaît également des pointes transitoires pendant et après les périodes de fortes pluies voire d’orage dans les vallées de montagne.

La petite hydroélectricité

En France, la petite hydroélectricité (qui peut venir tout aussi bien de centrales à retenue que de centrales au fil de l’eau) produit déjà 7,5 TWh / an, soit 10% de la production d’hydroélectricité nationale fournie par 2200 centrales de petite puissance (inférieure à 10 MW). Les petites centrales hydroélectriques ont un fort potentiel. : des milliers de sites ne sont pas exploités faute de technologies qui permettent d’optimiser l’investissement pour obtenir un coût installé raisonnable. 

Les centrales d’une puissance supérieure à 4,5 MW appartiennent à l’Etat qui en confie l’exploitation à un opérateur, sous le régime de la concession.

Pour les petits producteurs (propriétaires privés), exploiter de nouveaux sites de petite hydraulique ou « micro-centrale »  (moins de 4,5 MW) nécessite une autorisation (ou un « droit d’eau »), qui ne peut pas être accordée si les installations constituent un frein à la continuité écologique (ex : protection des poissons migrateurs). D’autres dispositions qui s’ajoutent divisent de fait par trois le potentiel hydroélectrique des sites vierges pouvant faire l’objet de nouvelles installations.

En effet, même pour dériver et aménager un cours d’eau non classé, un particulier devra déposer un dossier assez complexe en préfecture qui servira pour la consultation des autorités compétentes (DDAF, DDE, DRIRE, DREAL) et des parties concernées (pêcheurs, riverains, etc.). 
La procédure est lourde et longue (au moins un à deux ans).

La mise en valeur de cette énergie est donc freinée par des contraintes économiques, administratives et environnementales.

La règlementation

Parmi les installations hydroélectriques , 400 relèvent du régime de la concession et 2 100 de celui de l’autorisation, selon que leur puissance excède ou non 4,5 mégawatts (MW).

Elles doivent nécessairement s’articuler avec les règles complexes relatives à la restauration de la continuité écologique des cours d’eau : en effet, depuis la loi dite « LEMA »du 30 décembre 2006, prise en application d’une directive européenne visant à préserver la qualité de l’eau, les cours d’eau peuvent faire l’objet d’un classement en deux catégories par l’autorité administrative : 

  • sur les cours d’eau de catégorie 1, qui sont caractérisés par un très bon état écologique ou identifiés comme des réservoirs biologiques, il est interdit d’accorder toute nouvelle autorisation ou concession d’ouvrage constituant « un obstacle à la continuité écologique ».
  • sur les cours d’eau de catégorie 2, sur lesquels il est nécessaire d’assurer le transport des sédiments ou la circulation des poissons, la gestion, l’entretien et l’équipement d’ouvrages sont subordonnés à des règles définies par l’autorité administrative.

Les coûts, comme la règlementation,  peuvent réduire considérablement son potentiel de développement. Par exemple, à elle seule, une « passe à poissons » représente un coût d’investissement total de 2 à 5 millions d’euros pour une centrale d’1 MW.

Conclusion

Même si  les quelques accidents qu’il y a eu (destruction des barrages) ont été plus mortels que tous les accidents nucléaires au monde, on peut dire que l’énergie hydroélectrique est de loin notre meilleur atout en matière d’énergie renouvelable électrique, cependant les potentialités sont minces en France, où les meilleurs sites ont déjà été occupés.

1 réflexion au sujet de « Le livre sur les énergies renouvelables (l’énergie hydroélectrique) »

  1. Un chapitre très clair et qui permet de comprendre le fonctionnement de la production électrique hydraulique, son utilité et ses avantages et inconvénients. L’hydroélectricté représente 70% du total des EnR en France (ce total représentant moins de 25% de la consommation nationale et 20 % de la production) ce qui permet de mesurer l’apport de l’éolien et du solaire … L’hydroélectricité reste donc et de loin la principale ressource en EnR.
    Pour rappel, la production d’électricité renouvelable a atteint 117 TWh en 2021, en baisse de 3,1 % par rapport à 2020. Le taux de couverture moyen de la consommation électrique par les énergies renouvelables a été de 24,9 % en 2021, en baisse de 8 % par rapport à 2020. Et 2022 ne s’annonce pas meilleur pour les EnR autres que l’hydroélectricité avec l’absence de vent que l’on constate partout …

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