Un de nos amis nous envoie ce texte pour prendre sa part au débat difficile : quelle transition énergétique voulons-nous ?
On peut lire sur le site d’EELV, dans les pages « Climat : Face à l’urgence agir enfin » les lignes suivantes : « Europe Écologie les Verts prône un nouveau rapport à la nature, à l’animal et au vivant. Afin que notre planète soit vivable et durable, il est urgent de protéger et restaurer la nature et la biodiversité, et de respecter toutes les espèces, ce qui induit l’abandon des énergies fossiles polluantes. Relier l’environnement et la santé constitue également un enjeu écologique et démocratique majeur, que nous ne pourrons relever qu’en nous engageant pleinement dans une transition énergétique de long terme (éolien, solaire …). Cela nous permettra également de donner des perspectives aux territoires ruraux par le développement d’une agriculture paysanne et écologique ».
Le consensus est largement acquis sur la nécessité d’un nouveau rapport au vivant. Pour ce qui est des énergies fossiles, c’est une double problématique qui est généralement comprise :
- L’extractivisme (épuisement des ressources dans des conditions sociales et environnementales catastrophiques)
- L’effet de serre via le CO2 résultant de leur combustion. On y ajoute les effets sur l’environnement et la santé des dérivés du pétrole : plastiques et pesticides.
Mais la question soulevée par le texte d’EELV est : « pourquoi n’aborder la nécessaire transition écologique que sous l’angle des énergies renouvelables (éolien, solaire) ? » N’y a-t-il pas là une réduction de la vision globale à laquelle doit nous conduire l’impératif d’un nouveau rapport au vivant. Cela pour au moins 2 raisons :
- Prôner avant toute chose la production d’énergie, c’est laisser entendre que la croissance (même « verte ») reste l’objectif majeur.
- S’engager pleinement sur des énergies renouvelables c’est risquer de reproduire les erreurs de l’épisode précédent : extractivisme et méfaits sur la biodiversité.
Des voix de plus en plus nombreuses appellent à la plus grande prudence dans la course qui s’engage – qui s’emballe – aux énergies renouvelables et au tout électrique. Voici une liste de points de vue sur ce sujet, pour ouvrir un vrai débat.
Une politique énergétique qui engage notre avenir et celle de la planète se doit de poser les bonnes questions.
- Veut-on vraiment réduire les consommations et améliorer l’efficacité énergétique tous équipements compris ? Mais alors, où sont les actes forts d’économie d’énergie ? C’est bien le contraire que l’on constate dans bien des domaines. Exemple récent, la décision d’adopter la 5G qui, selon les estimations des industriels eux-mêmes, entrainera en France une consommation supplémentaire de 10TWh, soit 2% de la consommation actuelle d’électricité et plus que la production d’une centrale nucléaire de 900MW, alors qu’aucune évaluation sérieuse des avantages et des risques de cette technologie n’a été réalisée.
- Veut-on garantir à l’ensemble des citoyens une énergie la plus renouvelable possible, la plus fiable pour les divers usages (transport, industrie, agriculture, habitat, etc.) et la moins onéreuse ? Produire une énergie la plus renouvelable possible, oui, mais quelles matières premières seront nécessaires pour la production énergétique, d’où proviennent-elles ? Dans quelles conditions sont-elles extraites ou produites ? Sont-elles recyclables ? En résumé, quelle analyse du cycle de vie ? Aucune source d’énergie dite renouvelable n’est indemne de menaces pour l’environnement. L’hydroélectricité perturbe la continuité écologique des cours d’eau. L’énergie bois produit déjà des effets négatifs sur nos forêts. La certification des pellets de bois, par exemple, ne porte que sur leur qualité de carburant, rarement sur les conditions d’exploitation des forêts. La méthanisation pose des problèmes quant aux caractéristiques des intrants et des digestats dont certains entraînent une pollution des sols et des nappes phréatiques. Les centrales photovoltaïques de grande taille, implantées en milieu naturel, réduisent les habitats de la faune sauvage et contribuent à la perte de biodiversité. Le développement des agrocarburants a des impacts négatifs connus en matière de déforestation sous les tropiques (huile de palme) et perpétue en Europe le modèle de l’agriculture industrie, au bilan carbone et environnemental désastreux. L’éolien industriel cumule à lui seul le plus grand nombre d’inconvénients : importation de matériaux stratégiques (terres rares notamment), consommation massive de béton, artificialisation des sols, impact négatif sur l’avifaune, etc.
- Enfin, quels sont les avantages et les inconvénients du tout électrique ? La multiplication d’un parc automobile à motorisation électrique ne fera que déplacer le problème de la surconsommation et de la pollution urbaine (celle liée à l’usure de l’asphalte, des pneus et des freins, entre autres, restera inchangée). Plutôt qu’un changement de motorisation, il faut promouvoir des changements dans les pratiques de mobilité. Et a-t-on mesuré l’impact économique des besoins de raccordement des EnR au réseau électrique ? Lignes à hautes tension enfouies, traversant et perturbant les aquifères, postes sources, transformateurs se multipliant sur le territoire, parfois surdimensionnés, artificialisant des sols, etc. Il faudrait impulser une décentralisation de la production et de la consommation d’énergie, au lieu de renforcer encore les grands systèmes centralisés.