Éolien flottant en Méditerranée : pour quoi faire ?

Le 1er Ministre annonce son soutien et le lancement des appels d’offres en 2023 pour l’éolien flottant en Méditerranée (voire ici Éolien flottant en Méditerranée : le gouvernement se décide et organise la filière (Actu Environnement)
En déplacement à Port-La-Nouvelle (Aude), le chef du gouvernement a renouvelé son soutien à cette nouvelle filière stratégique, dans la lignée de son discours de Saint-Nazaire, l’été dernier. « Notre premier objectif doit être de produire de l’énergie issue de l’éolien flottant et notre second objectif est de produire les composants industriels nécessaires en France. » Dans cette optique, le locataire de Matignon a annoncé le lancement de l’appel d’offres pour les deux premiers parcs flottants commerciaux en mer Méditerranée.

Kevin Jeanroy réagit et nous fait part de ses réflexions. 

Cette annonce est un argument électoral, le gouvernement annonce son soutien au projet peu importe si le retour d’expérience des fermes pilotes ne sera pas encore palpable, puisque les premières devraient être mises en service cette même année 2023. 

La décision est donc belle et bien prise depuis longtemps, au moins depuis l’extension du port de Port-La-Nouvelle, la concertation, utile et riche en débat, n’influera pas sur la décision. Par cette annonce, le gouvernement fait du pied à la majorité régionale et aux écologistes “éolien compatibles”. 

L’extension du port de Port-La-Nouvelle va quintupler les capacités de transit de marchandises et cette extension, en grande partie déjà réalisée, n’est en fait justifiée par la région Occitanie que par ce projet d’éolien flottant en mer. Concertation ou pas, l’infrastructure est déjà réalisée, il faudra bien la “rentabiliser” au final. (A lire absolument à ce sujet le dossier sur l’extension du port de Port-La-Nouvelle et le collectif  Balance Ton Port dans le journal trimestriel L’empaillé n°4 dans tous les kiosques d’Occitanie.)

Concernant les zones choisies, ce sont celles les plus proches des infrastructures stratégiques : Fos-sur-Mer et Port-la-Nouvelle, logique, mais on nous a quand même invité à réfléchir à différentes options de zones. Il y a la zone au large du Barcarès et de Leucate qui reste en option pour les futures extensions ou si Fos-sur-Mer se désiste. Rappelons aussi que Port-la-Nouvelle est destiné à devenir le nouveau “hub” de l’éolien flottant … et terrestre car les éoliennes en mer ne sont pas destinées à remplacer celles sur terre.

Nous avons de grande inquiétudes, nous associations de défense de l’environnement et de la biodiversité : nous l’avons dit et redit durant le débat EOS : le danger des pales fait craindre une hécatombe sur l’avifaune marine, l’avifaune migratrice et les chiroptères qui sont aussi des migrateurs. En période venteuse et nuageuse, certains oiseaux ont des techniques de vol qui les met gravement en péril. 

Il y a aussi l’impact sur la faune marine, les poissons, les mammifères marins etc. : les sons produits par ces installations vont perturber nombre d’espèces, (l’eau transporte les sons avec une très grande amplitude), se pose aussi la question des ondes et pertes électromagnétiques mais je ne suis pas ingénieur… 

Le débat public aura tout de même révélé la méconnaissance profonde des services de l’État sur la vie marine et sous marine des espaces potentiellement impactées par les projets.

Il faudrait réfléchir à un mode de production décentralisé pour l’usage des énergies renouvelables, avec de petits générateurs permettant d’adapter sa consommation aux périodes de production. Dans ce cas, les EnRs font vraiment sens et sont synonymes d’émancipation et de modération de la consommation car le soleil et le vent ont tout de même le mérite d’être disponibles quasi partout et à l’infini, mais c’est un modèle qui est à l’opposé du modèle productiviste industriel engendrant dépendance et monopoles.

L’électricité produite par des générateurs utilisant l’énergie du vent et du soleil est par nature intermittente et aléatoire : exploiter ces énergies de manière centralisée, avec des centrales géantes pour alimenter un réseau national et international qui doit être toujours stable et adapter en permanence la production à la consommation, n’est pas le plus logique. 

L’usage pertinent de ces énergies dites renouvelables demanderait un changement complet de notre rapport à la consommation d’énergie. Par contre si c’est pour continuer à surconsommer et à gaspiller comme avant, alors toutes ces installations n’ont rien d’ “écologique” et peu importe si le réseau et les compteurs deviennent “intelligents”.

La déperdition (gros gaspillage d’énergie) liée au transport de l’électricité soulève  un autre vaste débat, celui du stockage de l’électricité par électrolyse via l’hydrogène “vert”.

Les paysages, le calme et la plénitude que l’on peut ressentir en regardant simplement l’horizon marin, l’aménité de la beauté naturelle de ces rivages, n’auront plus rien à voir quand une vingtaine puis une centaine d’éoliennes clignoterons en permanence au large de la côte, ici ou ailleurs. L’inquiétude des acteurs du tourisme et des amoureux des bords de mer est donc aussi tout à fait justifiée.

Quel peut être l’avenir de ces grosses centrales éoliennes géantes tripales, surpuissantes ? Très loin au large et flottant ? Pour faire quoi ? Pour quel modèle énergétique ? Pour alimenter des panneaux de pub télévisuels géants ? 

Kevin Jeanroy

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